Réflexion d’une ingénieure : « Il est tout à fait normal de changer de direction en cours de route » 

10 février 2025

Robyn Jones et ses enfants, profitant des aurores boréales.

Robyn Jones, conseillère technique principale pour la gestion des résidus auprès de la COSIA, constate que les personnes qui choisissent de travailler dans ce domaine y demeurent généralement pendant plusieurs années. Selon elle, cet engagement s’explique par le caractère gratifiant, diversifié et dynamique du travail. 

« En regardant autour de moi aujourd’hui, je reconnais de nombreux visages qui évoluent dans le domaine des résidus miniers depuis aussi longtemps que moi, soit depuis 18 ans. C’est un petit groupe de personnes qui ont consacré leur carrière à travailler ensemble et à stimuler le changement. »

La gestion efficace des résidus miniers, qui sont constitués de sable, de limon, d’argile, d’eau et de bitume laissés après l’exploitation minière et l’extraction du bitume, joue un rôle essentiel dans l’exploitation des sables bitumineux.

Pour débuter sa carrière, Robyn a été embauchée dans le domaine de la planification minière après avoir obtenu son diplôme universitaire. Cependant, l’adoption de nouvelles réglementations sur les résidus miniers l’a amenée à intégrer une petite équipe chargée de réviser un plan afin d’en assurer la conformité. Cette expérience unique lui a permis de développer rapidement une expertise approfondie du domaine des résidus, tout en collaborant avec des collègues spécialisés en exploitation, en planification, en gestion de projets et en recherche. Grâce à cette synergie, l’équipe a ajusté le plan pour répondre aux nouvelles exigences, en y intégrant des technologies en constante évolution.

« Ce défi, auquel font face les entreprises exploitant les sables bitumineux, a favorisé une collaboration étroite entre toutes les parties. Au fil des ans, nous avons constaté une adoption rapide et à grande échelle des technologies que nous avions mises en place, bien au-delà du rythme habituel du développement technologique. Toutefois, même après le déploiement et la mise en œuvre de ces technologies, notre travail ne s’arrêtait pas là : nous cherchions sans cesse à les perfectionner. Pour y parvenir, nous retournions en laboratoire et collaborions avec des chercheurs ainsi qu’avec d’autres entreprises afin de relever les défis rencontrés sur le terrain. Dans d’autres secteurs miniers, il est rare de voir plus d’un cycle technologique au cours d’une carrière, mais dans le domaine des résidus, j’ai eu la chance d’en observer plusieurs. »

Ce désir d’évoluer dans un environnement en constante transformation, où chaque journée réserve son lot d’imprévus, est précisément ce qui a poussé Robyn à choisir une carrière en ingénierie. Elle envisageait d’abord des études en comptabilité, mais l’un de ses premiers emplois comme employée de bureau dans une société de services pétroliers a complètement changé sa perspective. Un ami de la famille, le seul ingénieur que Robyn connaissait, y travaillait et l’avait aidée à obtenir ce poste. Plus elle découvrait la nature de son travail, plus elle réalisait qu’elle aimerait occuper un rôle similaire, même si elle en connaissait encore très peu sur ce domaine.

« Ma mère était enseignante, et mon père, banquier. L’ingénierie n’était pas une carrière à laquelle j’avais été exposée durant mon enfance. » 

À partir de ce moment, Robyn a soumis sa candidature dans plusieurs écoles et a été acceptée en ingénierie à l’Université Queen’s.

« Je me suis dit : pourquoi ne pas tenter ma chance? Lors du premier cours de géologie de mon diplôme en ingénierie, le professeur a demandé à la classe : « Qu’est-ce que l’ingénierie? » La plupart des élèves se sont mis à rire, mais moi, j’écoutais attentivement et je prenais des notes parce que je n’en savais pas encore grand-chose », se remémore Robyn en souriant.

Après avoir obtenu son diplôme, Robyn a rapidement compris que l’ingénierie était la carrière qui lui convenait, elle qui avait toujours été passionnée par les énigmes et la résolution de problèmes. Lorsqu’est venu le moment de chercher un emploi, elle a choisi de retourner en Alberta pour travailler dans le domaine de l’exploitation des sables bitumineux, en se spécialisant dans la gestion des résidus miniers.

« Certaines personnes pensent qu’accepter continuellement des postes dans le domaine des résidus miniers revient à se limiter, mais pour ma part, cela a eu l’effet inverse. De la planification aux opérations, de nombreuses occasions se présentent pour surmonter différents défis, innover et apprendre. »

L’une des occasions que Robyn a trouvées particulièrement intéressantes concernait une mine qui venait tout juste d’être mise sur pied.

« Juste avant le début des opérations de la mine, nous avons découvert que des oiseaux nichaient dans la zone où nous devions déverser les résidus. Cela signifiait que cette zone était protégée, et nous avons dû revenir à la planche à dessin pour trouver rapidement un autre emplacement. »

L’équipe a proposé plusieurs options, qui ont rapidement été soumises à des examens itératifs avec la direction supérieure et toutes les parties prenantes, jusqu’à l’atteinte d’une solution viable qui répondait aux besoins de tous.

« C’était un bon exercice pour déterminer comment respecter les aspects économiques d’un projet, tout en atténuant et en gérant les défis environnementaux. Les deux ne sont pas forcément incompatibles. »

Ce n’est là qu’un exemple parmi tant d’autres où Robyn a été confrontée à des problèmes qu’elle n’avait jamais rencontrés auparavant et pour lesquels il n’existait pas de solution toute faite. Elle a dû faire preuve de créativité, d’ouverture d’esprit et de collaboration avec des personnes aux compétences variées pour résoudre ces défis.

« Ayant grandi en Alberta et y vivant encore aujourd’hui, je ressens un profond désir de participer à la résolution des enjeux liés aux sables bitumineux. Il est essentiel de poursuivre l’évolution des processus et des techniques tout en réfléchissant à l’héritage que nous laisserons. » 

Au début de la pandémie, Robyn avait deux jeunes enfants. Après être passée en mode télétravail, elle a décidé de prendre un congé prolongé afin de s’occuper de sa famille. Depuis son retour sur le marché du travail en 2024, elle apprécie la nouvelle perspective qu’elle a acquise durant cette pause.  

« Devenir maman a transformé ma manière de percevoir les choses et d’aborder mon travail. Je pense avoir trouvé un équilibre entre travail et maternité parce que j’ai su trouver des solutions à chaque étape de ma vie. J’essaie d’être réaliste par rapport à mes attentes et à mes engagements, et de les voir comme des occasions plutôt que comme des obstacles. Je ne peux plus aborder le travail de la même façon qu’à mes débuts, et j’accepte que ma manière de travailler ait évolué. Mes responsabilités en dehors du travail sont désormais plus nombreuses, mais mon efficacité, ainsi qu’une perspective renouvelée, sont devenues des atouts précieux pour réussir. »

Robyn attribue sa capacité à faire preuve de flexibilité en partie à un conseil qu’elle a reçu au début de sa carrière. 

« Au début de ma carrière, un mentor m’a fait faire un exercice pour planifier mon parcours professionnel. Il m’a parlé des cycles d’une carrière, expliquant qu’il y aurait des périodes où l’on souhaiterait assumer des rôles plus ambitieux et explorer de nouveaux défis, tandis qu’à d’autres moments, cela ne serait peut-être pas le choix le plus adapté. Il est important de trouver un équilibre entre ces phases et de les harmoniser avec ce qui se passe dans votre vie personnelle. Il y aura des moments où vous accomplirez un travail important, mais avec des horaires plus prévisibles ou une courbe d’apprentissage moins abrupte. Vous pouvez tirer parti de ces périodes pour perfectionner vos compétences ou investir plus d’énergie dans d’autres domaines, de sorte qu’en assumant des rôles plus évolutifs, vous soyez prêt à exceller dans ces nouvelles responsabilités tout en maintenant un équilibre. Cette conversation m’a appris à être patiente envers moi-même, à adopter un esprit plus ouvert et à aborder les occasions avec plus de réalisme tout au long de ma carrière, surtout en tant que parent sur le marché du travail. »

C’est cet état d’esprit que Robyn encourage ceux et celles qui débutent dans le milieu à adopter. 

« Je pense qu’il est important de se rappeler que, bien qu’il soit essentiel d’avoir un plan, il faut aussi être prêt à changer de direction. Si vous avez mis de l’énergie à essayer quelque chose et que cela n’a pas donné les résultats souhaités, donnez-vous la permission de vous réorienter. En repensant à mes attentes initiales et à l’évolution de mon parcours, je me rends compte que rien ne s’est vraiment déroulé comme prévu, et pourtant, tout cela s’est avéré bien plus enrichissant que ce que j’avais imaginé. Le plus souvent, le chemin que nous envisagions prend une tout autre direction, et c’est merveilleux! »